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// Communiqué de presse

Portrait du marketing de l’alcool au Québec : mousser la consommation avec des stratégies pour tous les goûts

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Montréal, le 13 mai 2021 – Alors que l’on apprenait récemment une hausse de la consommation (24%) et des hospitalisations liées à l’alcool (5%), au Canada, en temps de pandémie, l’Association pour la santé publique du Québec dévoile son rapport Portrait du marketing de l’alcool au Québec : des stratégies pour tous les goûts suivant une recension menée en 2019-2020[1].

« Les stratégies sont nombreuses pour mousser la consommation d’alcool des Québécois.es : noms évocateurs, emballages accrocheurs, rabais offerts sur les achats multiples, soirées 5 à 7, cartes-cadeaux, objets promotionnels ou remises en argent à l’achat d’alcool, dégustations, publicités affichées et autres font partie des pratiques observées et ce, autant chez les restaurateurs, les tenanciers de bars et les commerçants que dans les succursales de la SAQ. On incite à acheter plus et à consommer plus », illustre Me Marianne Dessureault, porte-parole de l’ASPQ en matière d’alcool et autrice du Portrait.

Proactive pour accroître ses ventes, l’industrie de l’alcool a même pris des couleurs de pandémie : « la recension nous a permis de remarquer que l’industrie des boissons alcoolisées a adapté ses stratégies commerciales en période de Covid-19 pour continuer à rejoindre les consommateurs. Par exemple, on a vu des publicités ciblées sur les réseaux sociaux, des 5 à 7 virtuels organisés par l’industrie, des nouvelles boissons reprenant des symboles de la crise sanitaire ou alors un étalage tape-à-l’œil en forme d’arc-en-ciel. On nous invite même maintenant à boire plus et à acheter pour soutenir l’économie locale », souligne Me Dessureault.

Le problème est que la consommation régulière d’alcool est associée à plusieurs maladies chroniques comme le cancer, différentes dysfonctions du foie ou encore des troubles cognitifs. Lorsqu’il est question d’abus, elle est aussi liée à des traumatismes accidentels, des actes de violence, des comas ou des morts subites. « Malgré cela, beaucoup de consommateurs et de jeunes banalisent les dangers associés à une surconsommation d’alcool. Cela représente des coûts sociaux et de santé de plusieurs milliards de dollars pour le Québec », déplore Me Marianne Dessureault.

Les publicités et les promotions de l’alcool sont omniprésentes dans l’espace public et nous y sommes tous exposés. Cette exposition influence notre usage d’alcool et affecte particulièrement les personnes vulnérables comme celles en situation de dépendance ou à plus faible revenu, les enfants et les adolescents. L’ASPQ propose ainsi d’interdire les promotions et les publicités des boissons alcoolisées dans l’espace public afin de protéger certains groupes plus vulnérables.

« La publicité d’alcool est visible partout et par tout le monde : aux arrêts de bus, sur les vitrines extérieures des SAQ et des dépanneurs, aux pompes des stations-service, à la télévision pendant des émissions populaires et de grande écoute, etc. La publicité devrait être restreinte à l’intérieur des lieux de vente », réclame Me Dessureault.

L’ASPQ souhaite qu’un tel portrait rappelle l’importance de la mise en place d’environnements sains et sécuritaires en matière d’alcool et que la prévention, à tous les niveaux, doit devenir une priorité. Il reste encore beaucoup de travail et de concertation afin de lutter contre la banalisation de la consommation d’alcool. Comme quoi, dans ce cas, il y a encore loin de la coupe aux lèvres.

Le produit : À chacun son verre

  • La segmentation du marché par les acteurs de l’industrie de l’alcool les incite notamment à multiplier et à diversifier leur offre de boissons alcoolisées pour mieux plaire et cibler les différents types de consommateurs. Cette segmentation est de plus en plus fine pour de produire une boisson spécialement conçue pour eux, propre à leur identité et pouvant créer un lien émotionnel avec la marque ou le produit.
  • Cinq catégories principales de boissons alcooliques sont reconnues : l’alcool, les spiritueux, le vin, le cidre et la bière. Plusieurs types de produits plus spécifiques dérivent de ces catégories.
  • Les entreprises n’hésitent pas à offrir des produits variés avec davantage de caractéristiques attrayantes : Diversité de formats, Différentes teneurs en alcool allant de la faible teneur en alcool à des alcools forts, Variété de pastilles de goût, Noms et emballages colorés et évocateurs associés à un style de vie, Caractéristiques particulières pour créer l’illusion de produits « santé » ou à valeur ajoutée.
  • On trouve une déclinaison de produits, de contenants et de formats, qui contribuent, à l’achat, mais aussi à la multiplication des occasions de consommation chez un même segment ou type de consommateur

Le prix : les rabais payants 

  • Sachant que le prix est un facteur influant sur le comportement d’achat, l’industrie mise sur des pratiques visant à diminuer le prix de vente des boissons alcoolisées, tous types d’alcool confondus : Rabais fréquents, mis de l’avant et encourageant l’achat multiple, Gratuités sur l’alcool et spéciaux de soirée, Promotions croisées, Programmes de récompenses et cartes-cadeaux, Affiches et publicités annonçant les bas prix.
  • Les promotions sur les prix sont publicisées largement et par des moyens de diffusion divers : médias sociaux et plateformes numériques, feuillets publicitaires d’épiceries, affiches dans les établissements de vente et à l’extérieur de ceux-ci.
  • 74 % des boissons alcoolisées promues dans les feuillets publicitaires des grandes bannières de supermarché mettent en évidence une promotion sur le prix illustrant l’importance de cette stratégie commerciale.
  • Seuls les produits de la bière vendus par les titulaires de permis d’épicerie sont soumis à un prix minimum de vente. Les fabricants de bière et les titulaires de permis sont donc créatifs afin de le rendre concurrentiel
  • Les pratiques promotionnelles visant à diminuer le prix de vente rendent caduque la politique de prix minimums imposés en réduisant la valeur nette de la bière (moins la valeur du cadeau ou rabais) parfois sous ce fameux prix plancher.
  • 42 % des bières promues dans les circulaires étaient vendues au prix minimum ou près du prix minimum exigé (sur 3 semaines).

La distribution : tous les chemins mènent aux consommateurs

  • Le consommateur, qui doit être âgé de 18 ans et plus, peut se procurer aisément des boissons alcoolisées dans de nombreux points de vente : épiceries, dépanneurs et stations-service, points de vente de la SAQ, bars, clubs et restaurants.
  • Le consommateur peut trouver des boissons alcoolisées dans plus de 8 000 points de vente au détail et auprès de plus de 12 000 titulaires de permis d’alcool.
  • Les services de livraison via notamment des plateformes en ligne augmentent la disponibilité et l’accessibilité physique de l’alcool.
  • Le consommateur peut se procurer des produits alcoolisés près de 20 heures par jour.
  • Les entreprises misent sur l’augmentation de l’accessibilité et de la disponibilité des produits comme stratégie de vente.
  • Les consommateurs sont exposés plusieurs heures par jour et à de nombreuses occasions aux promotions des produits alcoolisés dans les points de vente, y compris lorsqu’ils fréquentent ces commerces pour se procurer d’autres produits que l’alcool. Cela peut stimuler des achats impulsifs.
  • La quantité et la densité de points de vente Il faut donc évaluer avec prudence toute autre mesure susceptible d’accroître l’accessibilité physique de l’alcool et garder un œil attentif aux répercussions possibles des nouvelles mesures mises en place.

La promotion : présente sur tous les fronts 

  • Les publicités d’alcool occupent une place non négligeable de l’espace publicitaire et de l’espace public. Les boissons alcoolisées sont publicisées sur une pléthore de plateformes et de lieux et par de nombreux moyens augmentant ainsi l’exposition de groupes plus vulnérables à celles-ci : Plateformes numériques, télévisées et radiodiffusées ; Feuillets publicitaires des supermarchés ; Affichage extérieur dans l’espace public ; Affichage à l’intérieur des établissements de vente ; Revues et journaux.
  • On a observé une moyenne de 103 publicités promotionnelles de produits par semaine uniquement dans les circulaires des cinq grandes bannières de supermarché.
  • Plusieurs moyens sont utilisés pour attirer l’attention des consommateurs sur les publicités et les marques en plus d’être sur les lieux d’affluence : Influenceurs ou personnalités publiques associés ; Couleurs, titres et slogans accrocheurs ; Commandites de groupes ou d’événements ; Présence lors d’événements populaires ; Relations publiques ; Placement de produits ; Concours ; Produits dérivés ; Étalages tape-à-l’œil.
  • Certaines publicités font même allusion à des activités ou des comportements qui, associés à des produits alcoolisés, sont dangereux ou contraires aux recommandations de consommation à faible risque.

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Source : Me Marianne Dessureault

Responsable des affaires juridiques et chargée de projet alcool

Cellulaire : 514-250-2587 – Courriel : mdessureault@aspq.org